Le silence intérieur : comment et en vue de quoi ?

 

Nous avons remis le silence à sa place dans la prière dans notre précédente intervention. Cette réflexion nous a laissés devant l’importance du silence intérieur. Que faire pour travailler à ce silence intérieur ? Que mettre en place pour y parvenir ? C’est une question très intéressante qui mérite un réel approfondissement.

Nous voudrions juste ici ouvrir quelques pistes de réponse à cette question. Disons que le silence intérieur se construit sur trois piliers : 1-Le cadre de vie ; 2-Le silence des lèvres ; 3-L’ascèse du cœur.

1-Le cadre de vie

L’homme est en relation avec son environnement ou son milieu de vie dont il subit toujours l’influence positive ou négative. Or, celui-ci peut-être bruyant ou silencieux, agité ou calme. La recherche du silence doit donc conduire à bâtir un environnement moins bruyant et plus tranquille. Celui qui veut cultiver le silence extérieur et intérieur a besoin de se donner un cadre plus calme et moins bruyant. Dans un monde marqué par un bruit incessant et assourdissant, rechercher et bâtir des lieux de silence est indispensable. Ce n’est pas seulement une question de spiritualité mais aussi de santé publique. Le bruit fatigue, agresse et empêche la concentration indispensable à la réflexion et à la créativité. Il est de rigueur dans les hôpitaux, les laboratoires, les bibliothèques… bref, il est important de se donner des lieux de silence ou bien de les fréquenter. Quand on entre dans un cadre silencieux, tel par exemple un musée, il nous impose le silence…

2-Le silence des lèvres

 Il faut s’exercer à se taire, et à parler quand c’est nécessaire. Cet entraînement est difficile pour des personnes qui ont toujours quelque chose à dire. Mais il permet une économie d’énergie intérieure. Le flot de paroles s’accompagne toujours d’un dilapidage de force intérieure. Par le silence des lèvres, on économise des forces, on apprend à écouter et à réfléchir avant de parler. Qui ne perçoit ce qu’on a à y gagner… Ce silence permet en outre d’éviter beaucoup de péchés en parole. Un cadre silencieux et calme avec une bouche silencieuse conduisent aux portes du monde intérieur.

3-Le silence intérieur ou l’ascèse du cœur

Il puise donc aux premiers silences extérieurs. Pourtant, on ne parvient au silence intérieur qu’en faisant silence en soi au prix de beaucoup d’efforts. Ceux-ci consistent à lutter contre l’envahissement des souvenirs, à chasser dès leur apparition les mauvaises pensées et les mauvaises images. Pour cela, il faut éviter tout ce qui peut solliciter négativement nos sens: paroles et musiques obscènes, images et films envoûtants l’esprit au point de tyranniser son attention et sa volonté, sensations éveillant la sensualité à toutes sortes d’inconduites… Cela exige qu’on veille sur tout ce qui rentre dans son cœur par les sens en rejetant tout ce qui pourrait le troubler et le souiller intérieurement. On le fait en évitant ces choses et en les rejetant immédiatement de son esprit. Lorsque des images, des pensées, des paroles et des souvenirs négatifs émergent dans du cœur : il faut les remplacer par leur contraire, ou bien revenir au réel en prenant conscience de tout ce qui est autour de soi. C’est la première méthode de lutte. La deuxième consiste à prier aussitôt dans son cœur dès leur manifestation. Il s’agit de ne pas faire attention à ces choses mais de regarder à Dieu habitant en nous par la foi et à le prier avec ferveur. Cette méthode a une variante qui consiste à utiliser ces mauvaises pensées pour parler à Dieu. On se sert alors de ces mauvaises pensées et autres comme d’un carburant pour la prière. La troisième méthode consiste à trouver la parole de Dieu qui condamne la pensée négative et à la réciter mentalement chaque fois qu’elle va se présenter à notre esprit. Dans la quatrième méthode, on utilise des exercices de respiration consciente. On expire et inspire profondément en prenant juste conscience de son souffle et de son corps jusqu’à ce que la mauvaise pensée disparaisse. Cette méthode est associée chez les moines chrétiens d’Orient à l’invocation du nom de Jésus avec foi, repentance et amour.

Ces efforts permettent de vider son esprit des pensées négatives pour ne cultiver que des pensées nobles et la prière intérieure. Petit à petit le cœur devient plus calme, la paix y fait son entrée. Il devient comme une chambre intérieure, ou comme un living-room bien en ordre où l’on rencontre Dieu dans un dialogue amoureux.

En pratiquant cela de manière fréquente et profonde, la prière envahit le cœur qui devient tel un brasier d’amour. Plus cet état grandit, plus l’esprit est dégagé de toutes sortes de bruits. La prière devient alors un état spirituel plus naturel et plus pur car les mauvaises pensées n’arrivent plus à distraire et polluer l’espace intérieur de leur mauvaise haleine.

En persévérant dans cet état, tout en se nourrissant des sacrements et en prenant des temps de retraites silencieuses avec la pratique habituelle de la méditation, l’esprit rentre dans le silence amoureux du cœur-à-cœur avec Dieu. En plus de l’obtention de ce calme intérieur, bientôt Dieu permettra à l’âme de goûter à l’amour divin par-delà toute parole intérieure. Il lui arrivera comme d’être hors du temps, saisie juste par la présence et l’amour de Dieu…

Dans cet état, le démon a moins de prise sur l’âme car il n’arrive plus à utiliser l’agitation des bruits du dehors et du dedans pour la distraire… Cet état représente par conséquent une grande victoire contre ses mauvaises tendances intérieures et contre le démon qui les utilise souvent pour distraire et maintenir le fidèle dans le péché intérieur qui est la racine des péchés en action…

À chacun de lutter pour atteindre ce silence intérieur. Les pistes données ici peuvent aider. Mais n’oublions pas que si ce silence s’acquiert de haute lutte, il ne peut s’obtenir sans la grâce divine. Il faut donc tout en y travaillant, le demander à Dieu au nom de son Fils Jésus-Christ. Dieu ne fait en effet cette grâce qu’à ceux qui la recherchent et y travaillent durement.

Puisse notre prière, silencieuse ou vocale, privée ou publique, nous ouvrir à ce silence du cœur. Il est un état spirituel du cœur purifié de la débauche des pensées, des images, des sentiments intérieurs négatifs qui dressent un mur de péchés entre nous et Dieu dans notre monde intérieur.

Bénédiction à tous dans le Saint Nom de Jésus, amen !

 

Paul-Marie Mba (CB)

Le silence et la prière L’œil ne peut éviter la montagne !

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